Après 33 ans d’existence : L’AEEM dissoute par les autorités de la transition
Depuis un certain temps, les autorités de la transition ont entamé la dissolution de certains partis politique et associations qui osent critiquer la transition ou sa gouvernance. Cela sous-entend que les autorités de la transition, dirigée majoritairement par les militaires tend vers une dictature ? En tout cas, c’est la question qui taraude aujourd’hui les esprits. En effet, après la dissolution de l’association « Kaoural Renouveau », l’Association dénommé « Coordination des Mouvements, Associations et Sympathisants de l’Imam Mahmoud DICKO », le gouvernement via son ministre de l’Administration territoriale vient de dissoudre l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM).
L’information a été donnée lors du conseil des ministres du mercredi 28 février 2024. En effet, le ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le Colonel Abdoulaye Maïga, a informé le Conseil des Ministres de la dissolution de l’association dénommée « Association des Élèves et Étudiants du Mali (AEEM) ». Selon lui, la dissolution des associations par le Conseil des Ministres est prévue et réglée par les dispositions de la Loi n°04-038 du 5 août 2004 relative aux associations. Ainsi, il rappelle que l’Association des Élèves et Étudiants du Mali « AEEM » est une association de droit malien créée suivant le récépissé de déclaration d’association n°10281/MAT-DNAT du 20 avril 1991.De ce fait, il regrette que depuis plusieurs années, force est de constater que l’AEEM ne défend plus les nobles causes des élèves et étudiants conformément à ses objectifs. Elle a été plusieurs fois accusée d’être responsable de violences et affrontements en milieu scolaire et universitaire, caractérisés par de nombreux accrochages à main armée entre les différents clans de ladite association.
Les raisons évoquées
Cependant, le ministre Maïga fait savoir que le dernier affrontement en date du 28 février 2024, a causé la mort d’un jeune étudiant de la Faculté des Sciences Économiques et de Gestion et plusieurs blessés graves. Ces agissements, d’une extrême gravité, sont survenus dans la perspective du renouvellement des instances du bureau de coordination de l’Association des Élèves et Étudiants du Mali et ont provoqué la suspension immédiate de ses activités dans l’espace universitaire jusqu’à nouvel ordre. Il ajoute ainsi que des pratiques similaires ont eu lieu en décembre 2017 entre des factions rivales du comité AEEM de la Faculté des Sciences et des Techniques et provoqué un mort. En octobre 2018, des affrontements à coup d’armes à feu et de machettes, opposant des clans rivaux du comité AEEM de la Faculté de droit privé, ont fait neuf (9) blessés dont deux (2) graves. « A chacun de ces événements malheureux, les forces de sécurité ont fait des descentes inopinées au niveau du siège de l’association, qui se sont soldées par des arrestations de certains membres ayant en leur possession des armes létales, des stupéfiants et de grosses sommes d’argent non justifiées. Les agissements en cause sèment des troubles au sein de l’espace scolaire et universitaire et provoquent des perturbations des cours, des assassinats, des meurtres et des destructions de biens publics et privés par des manifestations violentes de rue et des ports illégaux d’armes », indique le ministre Abdoulaye Maïga. Au regard de ces constats, souligne-t-il, l’Association des Élèves et Étudiants du Mali « AEEM » est dissoute. Et de préciser que cette dissolution contribue à la réalisation de l’une des recommandations des Assises Nationales de la Refondation : « Pacifier l’espace scolaire et universitaire pour en faire un lieu d’acquisition de savoirs et de connaissances et non de vandalisme et d’agressions permanentes ».
Les réactions
Après l’annonce de cette dissolution les avis divergent. Pour certains, l’AEEM mérite d’être dissoute car ladite association était devenue un lieu de délinquance et de criminalité. N’importe qui pouvait être leaders et qui pour la plupart sont ne valent rien en classes. Ils profitent de cette association non seulement pour se faire de l’argent mais aussi pour avoir la clémence de l’administration pour passer en classe supérieure. Ainsi, ils déclarent que cette association estudiantine était devenue une machine à la solde des hommes politiques ou au pouvoir. Certes, certains de ses leaders possèdent des qualités mais malheureusement la majorité des leaders ou sympathisants de l’AEEM sont des vauriens, des délinquants qui ne font que semer des violences en milieu scolaire et universitaire. Par contre, d’aucuns aussi estiment que la transition a trop abusé en dissolvant cette association qui est l’un des acteurs de l’avènement de la démocratie dans notre pays. Pour eux, l’association avait besoin de se reformer mais pas d’être dissoute. Ils estiment que ce n’est pas l’Aeem seule qui constitue le problème de notre école. Pour eux, ce sont les autorités maliennes qui ont bafoué l’école malienne, car la plupart d’entre eux ont leurs enfants à l’extérieur pour des études. « Comment on peut comprendre que dans certaines de nos écoles il y a manque de classes, de craies, d’enseignants ? Dans nos facultés, les bourses des étudiants ne viennent jamais à temps et c’est le système de bancarisation qui a minimisé les détournements des bourses et trousseaux des étudiants. Donc l’AEEM avait son rôle à jouer face aux négligences et laxisme des autorités », nous confie, Daouda Traoré.
L’indignation de la CNDH
Par ailleurs, face à ces différentes dissolutions des associations et partis politiques, qui constitue un acte antidémocratique, le Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), Aguibou Bouaré s’est exprimé dans un communiqué en date du 05 mars 2024, avant la dissolution de l’Aeem. Selon lui, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) reste préoccupée face aux menaces sérieuses pesant sur l’exercice de certains droits civiques et politiques, notamment la liberté d’association. « Elle s’indigne contre la tendance systémique de dissolution et/ou de suspension de partis politiques et/ou d’associations », déclare-t-il. Il rappelle les autorités de la transition certains principes en se fondant, entre autres, sur la Constitution du 22 juillet 2023, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. Raison pour laquelle, le Président Bouaré souligne que la CNDH rappelle les responsabilités de l’État sur la protection des citoyens, et sur la garantie des libertés fondamentales comme la liberté d’association, conformément à la réglementation, en tout temps, en tout lieu et en toute circonstance. Ainsi, elle attire l’attention sur le fait que l’exercice des droits civiques et politiques ci-dessus évoqués constitue l’essence d’un Etat démocratique respectueux des droits de l’Homme. D’inviter les populations, les hommes de médias et les utilisateurs de réseaux sociaux à éviter tout propos incitatif à la haine et à la violence. Avant de recommander aux autorités de persévérer dans la quête de la concorde sociale et d’une paix durable.
M.L. KONE
LE FONDEMENT