Franc CFA : Les explications historiques de Idrissa Traoré, ancien Directeur National de la BCEAO pour le Mali

Franc CFA : Les explications historiques de Idrissa Traoré, ancien Directeur National de la BCEAO pour le Mali

Dans une interview, l’ancien Directeur national de la BCEAO, Idrissa Traoré non moins actuel Président du Conseil d’Administration de UBA-Mali, souligne que depuis un certain temps, le franc CFA est au cœur d’une vaste polémique au sein des communautés africaines qui l’utilisent : les huit États de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) et les six États de l’Union Monétaire d’Afrique Centrale (UMAC).

 Tout d’abord, il explique que la Zone Franc est constituée d’un ensemble de pays, qui ont décidé, au lendemain de leur accession à l’indépendance, de maintenir avec la France, selon des modalités contractuelles, des liens particuliers en matière monétaire sur les bases d’une coopération organique. Elle est composée de : la France avec ses départements et territoires d’outre-mer, les pays liés à elle par des conventions monétaires spéciales qui prévoient notamment l’existence d’un compte d’opérations ouvert par le Trésor français aux instituts d’émission de ces pays. Il s’agit de 8 pays de l’Afrique de l’Ouest, membres de l’Union Monétaire-Ouest Africaine (UMOA) : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo. Pour le cas de la Guinée-Bissau, il précise qu’elle est admise comme membre pour compter du 1er janvier 1997. En outre, les 6 pays de l’Afrique Centrale, membres de l’Union Monétaire d’Afrique Centrale sont : Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Équatoriale, Tchad. La Guinée Équatoriale est devenue membre le 1er janvier 1985. La République Fédérale Islamique des Comores qui a adhéré à la Zone Franc le 23 novembre 1979 et dont la Banque Centrale émet le franc comorien.

La zone est divisée en deux sous-régions

Ainsi, selon lui, cette zone est donc divisée en deux sous-régions, chacune de structure assez homogène. Les huit (8) pays de l’Afrique de l’Ouest sont agricoles et majoritairement exportateurs de produits de base (coton, café, cacao). Les six (6) pays de l’Afrique Centrale sont surtout exportateurs de pétrole, à l’exception de la République Centrafricaine. La spécialisation des pays de la zone franc CFA dans l’exportation des matières premières non transformées demeure une caractéristique commune de ces économies. En conséquence, les fluctuations des cours des matières premières façonnent les performances macroéconomiques de ces deux sous-régions, souligne-t-il. Il ajoute ainsi que s’agissant plus particulièrement de la sous-région Ouest Africaine et à titre de rappel historique, le Dahomey (actuel Bénin), la Côte d’Ivoire, la Haute-Volta (actuel Burkina Faso), le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal décidèrent d’instaurer entre eux un pacte de solidarité dans le domaine monétaire.

La détérioration de la conjoncture

Il rappelle que par la suite, la République du Mali décida, le 29 juin 1962, de ne plus ratifier le Traité instituant l’UMOA. Elle a créé son propre Institut d’Émission et sa propre monnaie, le franc malien, qui a perdu la garantie du Trésor français. Toutefois, la détérioration de la conjoncture et le déséquilibre du commerce extérieur conduisirent le Mali à demander sa réintégration dans la Zone franc en 1967 : la Banque Centrale du Mali fut créée, avec un Conseil d’Administration paritaire et le franc malien redevenait convertible à l’intérieur de la zone au taux de 1 F malien = 0,01 FF. A ses dires, la période préparatoire a débuté par la dévaluation du franc malien, décidé le 6 mai 1967, et a été marquée par diverses mesures d’assainissement des finances publiques (accroissement des ressources et compression des dépenses, notamment par la fermeture d’ambassades, limitation des déplacements ministériels, suppression des frais de mission, réduction du parc automobile…) ainsi que la réorganisation des structures économiques (aménagement des sociétés d’État déficitaires et amorce de libération du commerce extérieur en particulier).

Toujours selon lui, le Mali a, par la suite, adhéré à l’UMOA le 1er juin 1984. Quant à la République Togolaise, elle signale le 29 octobre 1962 une convention avec la BCEAO, confiant à celle-ci la gestion provisoire du service de l’émission monétaire sur son territoire.  Une seconde convention, signée le 27 novembre 1963, mit fin à ce régime provisoire de l’émission monétaire au Togo qui devint membre à part entière de l’UMOA. Après une décennie de participation, les autorités mauritaniennes notifièrent officiellement le 27 décembre 1972 le retrait de leur pays de l’UMOA. Cette décision prit effet, au terme du délai statutaire, le 1er janvier 1973 et le transfert de l’émission sur ce territoire de la BCEAO à la Banque Centrale de Mauritanie fut réalisé le 9 juillet 1973.

Seydou K. KONE

Mali Actuel