Retrait du Mali de la CEDEAO : Une fuite en avant ou une volonté politique réelle ?
Dans un communiqué, en date du 28 janvier 2024, conjoint de trois pays dirigés par les militaires putschistes décident de retirer leurs pays respectifs de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Il s’agit du Mali dirigé par le Colonel Assimi Goita, du Burkina Faso du Capitaine Ibrahim Traoré et du Niger du Général de Brigade Abdourahamane Tiani.
En effet, dans leur communiqué, ils rappellent que désireux de réaliser l’intégration entre les États de la sous-région et mus par les idéaux de fraternité, de solidarité, d’entraide, de paix et de développement, leurs Excellences le Général Aboubacar Sangoulé Lamizana, le Général Moussa Traoré et Le Lieutenant-Colonel Seyni Kountché, respectivement Chefs d’État de la Haute Volta (actuel Burkina Faso), du Mali et du Niger, créaient avec douze (12) de leurs pairs, le 28 mai 1975, à Lagos, la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Selon eux, après 49 ans d’existence, les vaillants peuples du Burkina, du Mali et du Niger, constatent avec beaucoup de regrets, d’amertume et une grande déception que leur Organisation s’est éloignée des idéaux de ses pères fondateurs et du panafricanisme. En outre, la CEDEAO, sous l’influence de puissances étrangères, trahissant ses principes fondateurs, est devenue une menace pour ses États membres et ses populations dont elle est censée assurer le bonheur.
« En effet, l’organisation n’a pas porté assistance à nos États dans le cadre de notre lutte existentielle contre le terrorisme et l’insécurité ; pire, lorsque ces États ont décidé de prendre leur destin en mains, elle a adopté une posture irrationnelle et inacceptable en imposant des sanctions illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables en violation de ses propres textes ; toutes choses qui ont davantage fragilisé les populations déjà meurtries par des années de violence imposée par des hordes terroristes instrumentalisées et téléguidées », soulignent-ils. Ainsi, ils ajoutent que face à cette situation qui perdure, leurs Excellences, le Capitaine Ibrahim Traoré, le Colonel Assimi Goita et le Général de Brigade Abdourahamane Tiani, respectivement Chefs d’État du Burkina Faso, de la République du Mali et de la République du Niger, prenant toutes leurs responsabilités devant l’histoire et répondant aux attentes, préoccupations et aspirations de leurs populations, décident en toute souveraineté du retrait sans délai du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest.
Quelle légitimité pour le retrait
Cependant, la question qui taraude l’esprit est de savoir si ces militaires au pouvoir dans leurs pays respectifs ont mesuré les conséquences de cette décision surtout sur leurs populations. D’aucuns se demandent sur la légitimité de ces militaires au pouvoir pour prendre une telle décision. D’ailleurs, ces militaires sont tous venus à travers des coups d’État, un acte qualifié par la Constitution du Mali, de crime imprescriptible face à la population malienne. Alors, sur quel peuple comptent-ils pour assumer les conséquences de leurs décisions. Ainsi, d’autres estiment que cette décision est une fuite en avant, car ces pays doivent subir les conséquences de la CEDEAO pour faute de la tenue de leurs engagements pour le retour les pays à l’ordre constitutionnel. Au Mali, les élections devaient se tenir dans ce mois de février 2024 pour mettre fin à la transition, mais jusqu’à présent aucune date n’est indiquée par les autorités de la transition pour les organiser. Il est important de rappeler que les militaires putschistes ont renversé le pouvoir d’IBK en août 2020. Et 18 mois de transition a été accordé et malheureusement, on est à 4 ans, jusqu’à présent les militaires qui avaient juré une transition courte sont au pouvoir.
« Ces militaires et la CEDEAO sont pareilles. Les uns ont violé les Constitutions de leurs pays pour accéder au pouvoir et d’autres, leurs engagements. En réalité, nous traversons un moment difficile avec la transition. La sécurité est loin d’être assuré sur toute l’étendue du territoire national. Alors, le mieux est qu’ils organisent les élections pour le retour du Mali à l’ordre Constitutionnel pour le bonheur du peuple malien », nous confie Ousmane Dramé, un entrepreneur. Alassane Doumbia, ajoute que la CEDEAO joue un rôle crucial pour la communauté même si elle compte des failles dans son fonctionnement. Pour lui, la CEDEAO doit revoir sa gestion et les militaires doivent savoir qu’on ne doit pas venir au pouvoir par les armes. « Quand même il est temps que les africains prennent leur destin en mains mais pas avec les nombreux coups d’État. Sinon, nous les populations, qualifions la CEDEAO il y a plus dix ans de club des chefs d’État. Nous devrons soutenir cette décision mais il ne faut pas que ces militaires en profitent pour s’éterniser au pouvoir », énonce Yacouba Traoré, un enseignant. Pour Fatoumata Dembélé tant que les africains seront financés par les autres, leurs institutions seront manipulées. Même l’AES, créée par les militaires, n’y échappera pas. Pour elle, eux aussi sont en train de privilégier le partenariat avec la Russie, pourtant ces pays occidentaux sont tous pareils.
Par ailleurs, selon les textes de la CEDEAO, tout Etat membre désireux de se retirer de la Communauté notifie par écrit, dans un délai d’un (1) an, sa décision au Secrétaire exécutif qui en informe les États membres. A l’expiration de ce délai, si la notification n’est pas retiré, cet État cesse d’être membre de la Communauté. Le texte de traité édifie ainsi qu’au tour de la période d’un (1) an visée au paragraphe précèdent, cet État membre continue de se conformer aux dispositions du présent traité et reste tenu de s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du présent traité.
B. KONE